Visiter autrement les lieux du tourisme de masse

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Quiconque s’est renseigné un peu sur le fait touristique sait combien le tourisme de masse est dévastateur pour l’environnement écologique et social. Salaires médiocres, personnel non-syndiqué et corvéable, dévastation du sous-sol et des nappes phréatiques, des coraux, etc. Surtout, ces lieux d’urbanisation massive sont conçus pour favoriser la paresse, non seulement du corps mais aussi de l’esprit, et les comportements dépourvus de curiosité. Et pourtant, n’est-il pas possible de découvrir autrement les lieux de tourisme de masse ? Nous vous donnons trois exemples : en Thaïlande, en Espagne et au Mexique.

Le tourisme de masse est connu pour l’envergure des dégâts qu’il cause sur le plan environnemental, moins – hélas ! – sur les plans social, culturel et donc anthropologique. Il faut dire que la construction soudaine de villes artificielles, dans des pays où le respect de l’humain et de l’écologie n’a jamais été très prédominant, ne peut qu’avoir des conséquences dramatiques. A Cancun, l’érection d’une ville nouvelle à l’emplacement de ce qui n’était jusqu’alors qu’un village de pêcheurs, a fait passer la population de quelques dizaines à quelque 630 000 habitants en l’espace de 4 décennies. La présence massive et soudaine d’une population usant les ressources naturelles, et surtout de touristes dont les habitudes de consommation selon les standards occidentaux sont, en comparaison, démesurées, ont causé de graves dégâts environnementaux.

Outre le ravage des nappes phréatiques et la production colossale d’ordures, signalons la destruction de la moitié du récif corallien en trois grosses décennies… Cela a eu de lourdes conséquences lorsque l’ouragan Wilma frappa en 2005 tout le nord des Caraïbes. Et c’est encore sans parler des effets qu’une présence massive de cons-sots-mateurs peut générer : Ibiza ou Cancún sont réputées comme « plaques tournantes » du narcotrafic; le tourisme sexuel fait que Bangkok spontanément évoque surtout la prostitution tous terrains (pédophilie, femmes, hommes, ladyboys…), hausse de la délinquance (on nous a rapporté le cas des Maldives ou de l’île Maurice), multiplication des petits commerces dédiés à l’arnaque des portefeuilles-sur-patte qu’on appelle « touristes ». Et la liste est loin d’être exhaustive.

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Or, les « paradis » vendus par les professionnels de la tromperie touristique ne doivent pas leur réputation à rien. Simplement, profiter d’un lieu merveilleux entouré de milliers de personnes semblables dans leur désir, dans leur gestes, dans leur consommation… qu’y a-t-il de plus désagréable quand on se pense unique, individuel, différent ? Pour se sentir un peu moins mouton, même dans ces capitales de la moutonnerie mondiale, il suffit pourtant d’être un peu curieux et de porter sa curiosité plus loin que la majorité de ses semblables.

Thaïlande : en marge de la Full Moon Party de Koh Phangan

La Full Moon Party est une fête mensuelle d’envergure, où se réunissent pêle-mêle DJs plus ou moins médiocres, routards-teufeurs, prostituées et dealers (à l’occasion, de mèche avec la police locale). Une sorte de mini Spring Break mensuel dédié à la porcherie touristique des Occidentaux qui oublient qu’hors de leur pays, il conviendrait de se rappeler que le monde entier ne pense ni n’agit pas de la même façon.

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Et pourtant Koh Phangan est une île magnifique, à la beauté sauvage et dont l’urbanisme encore limité permet de s’y détendre tranquillement. Il suffit seulement de s’éloigner un peu des zones rouges de la bruyante imbécillité touristique… « Quitte à se faire sa propre teuf en petit comité loin de Lady Gaga, des dealers, du bruit, du whisky-coca et de la fureur ».

Ibiza (Espagne) : le revers du monde de la teuf

L’île est connue comme une des capitales mondiales de la teuf – et, complément logique, une plaque tournante du narcotrafic – et on y rattache volontiers les noms de la paire de « néantisateurs » David & Cathy Guetta.

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Connue aussi pour ses marchés artisanaux ou ses « hippies », l’île est suffisamment grande et diverse pour offrir aux personnes un peu curieuses des vacances qui ne se limiteraient pas au combo du vide ordinaire à quoi se résument les capitales du tourisme de masse. Il existe en effet diverses démarches écologiques très originales, méritant la visite, des grottes étonnantes, des paysages remarquables dans l’arrière-pays qui attirent peu les touristes, plus massivement avides de bronzette et de teuf… Or donc, pourquoi ne pas visiter l’île d’Ibiza différemment ?

Pourquoi pas s’éloigner de Cancún ?

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Pour beaucoup, Cancún est, pour leur voyage au Mexique, le point de chute… et pour tout dire : le point final. Pour avoir visité cette capitale du tourisme de masse, cette ville sans histoire et dédiée principalement à satisfaire les caprices des touristes majoritairement blancs, je peux affirmer qu’on n’y trouve rien de ce qu’on peut à bon droit espérer d’un voyage : quasiment pas de Mexicains, quasiment pas de bouffe traditionnelle, mais la fête partout et le Mexique utilisé comme prétexte pour des noms fantaisistes de restos et boutiques (Plaza la Fiesta, Casa Tequila, etc. : un peu comme la chanson « Sur un air latino » de Lorie)… A quoi sert de voyager si loin de chez soi pour se trouver dans une zone de confort surprotégée et conçue pour éviter absolument tout imprévu, toute surprise qui ne soit pas commercialisée ? Sentiment d’être dans un espace stérile et humainement froid comme un service d’urgences, où l’on vient soigner sa blessure auprès de professionnels aux gestes cliniques.

Cancún, pour nous, a été l’aéroport d’arrivée et le lieu de repos durant deux jours : nous ne voulions pas y demeurer, mais plutôt fuir cet univers contraire à nos valeurs et à nos goûts. Du coup, on est descendu tranquillement vers la lagune de Bacalar, tout au sud de l’Etat de Quintana Roo, non loin de la frontière avec le Bélize. Nous nous levâmes tôt et, 6h de bus plus tard, nous arrivions dans ce lieu magique, paisible, un village de moins de 11 000 habitants s’étirant paresseusement le long de sa lagune bleu azur, sous un soleil éclatant. Promenades, baignades, quelques rencontres et une soirée de fête dans le bar Rincón Pirata. Il y a là de quoi passer une belle semaine de vacances, entre amis ou en famille, au soleil, loin de la stérile agitation de la Riviera Maya et de Cancún, dont on sait trop bien que ceux qui y travaillent sont avant tout autre chose les serfs des capitalistes qui prospèrent là.

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A propos de l’auteur :



Formé par deux amis, Mikaël et Kalagan (auteur du blog éponyme) en 2012, Voyageurs du Net se donnait initialement pour but de défendre une vision du tourisme et du voyage alternative au tourisme de masse. Le temps passant, la ligne éditoriale du site a évolué, explorant projets communautaires ou écotouristiques, analysant aussi le fait touristique sur pièce, à partir d’exemples bien concrets et d’expériences vécues. Voyageurs du Net prépare à présent, pour 2014, deux gros projets : une nouvelle version du site, plus riche et plus professionnelle, ainsi qu’un premier eBook.